Histoires autour d'un tilleul

Parc Naturel Régional de Chartreuse

Reprenant le symbole du hibou, le tilleul serait le nichoir du plus veil arbre du massif de Chartreuse. Depuis les toutes premières réunions de constitution officielle du parc, nous répétons notre demande de valorisation de cet arbre multicentenaire. Ce résistant est enraciné rue du 8 mai 1945. Nous demandons également deux panneaux de fléchage en direction du tourisme: 1) route du col de clémencière, 2) départementale 107/rue de la Résistance: tournant rue de la Libération, en face à La Casamaures. (Le tilleul est situé le périmètre de protection de 500 mètres du seul monument historique de la commune), les marcheurs sont invités à monter aprés l'église, découvrir ce patrimoine végétal sur les contreforts de la Bastille, un résistant aux agressions urbaines et humaines.

Parc chartreuse: arbres remarquable: cédre et séquoia Saint Egrève, le platane de Voiron, réserve forestière du monastère de la Grande Chartreuse.

Protections officielles de l'arbre remarquable: une leçon vivante d'histoires locales

L'arbre est un "être vivant" c'est pour cela qu'il est difficile de le faire protéger légalement de nos jours, après le désastre des grandes tempêtes... selon M. Lagier, Direction Régionale de l'Environnement, Lyon.

Il est répertorié parmi l'inventaire des "arbres remarquables" de la FRAPNA en 1997 et l'association nationale ARBRES (label des arbres remarquables).

Il est dans le périmètre des 500 mètres de deux monuments historiques La Casamaures 1855 et celui des fortifications de Grenoble 1884. La municipalité n'a pas le droit de le faire couper sans demander l'autorisation à l'architecte chef du Service Départemental de l'Architecture et du Patrimoine, SDAP Hôtel de l'Equipement, Grenoble (art. 13 bis, 1er alinéas).

Culture et communication, République Française. Fiche pratique N°16: Soins recommandés par les brochures officielles sur les parcs remarquables, comment intervenir sur les branches et le tronc ?

A partir du moment où un arbre a subi des traumatismes, il faut intervenir pour lui procurer le maximum de chances de retrouver un développement équilibré. Seul un grimpeur-élagueur spécialiste de la taille douce peut supprimer les branches cassées, suivant un plan de coupe assurant une cicatrisation optimale, et assainir les plaies de l'écorce en supprimant tout foyer potentiel d'attaque cryptogamiques ou bactériennes.

Animée par Prosper Mérimée, la commission des monuments historiques est née dans les années 1830.. En 1851, onze ans après l'invention du daguerréotype, la commission commandite un relevé photographique des Monuments en Périls en France, ce qui sera l'acte fondateur des archives photographiques du ministère de la culture. A nous de retrouver des photos anciennes et surtout de le photographier dans sa dernière saison...

Malgré les demandes répétées des habitants aux deux derniers maires, pour faire enlever le goudron qui le tue inexorablement depuis neuf ans. Les services techniques n'interviennent pas pour réparer ce que tous les passants et les anciens qui se rendent au cimetière observent. Des gestes de bon sens seraient peu onéreux par exemple:

• Passer commande aux chirurgiens arboricoles pour les soins spécialisés, de la taille douce, travaux subventionnés par le conseil général de l'Isère services espaces verts naturels et la DIREN.
• L'arbre asphyxié dépéri manquant d'eau de pluie l'été, le ruisseau La Roize a été canalisé.
• Enlever le goudron et rajouter de la terre végétale en bordant de rochers ou barrière le terre-plein
• Détacher les boules de buis parasites qui perturbent la dernière branche charpentière survivante.
• Transformer le chemin gravillonné du chemin des fauvettes longeant le cimetière en usage exclusif piétons (interdiction aux voitures du lotissement du mas d'Auris d'y passer quotidiennement plutôt que par l'accès goudronné route du col de Clemencières). Le transformer en parcours de randonnée.
• Valoriser ses abords comprenant un reposoir, pédiestral de pierres surmonté d'une croix de procession en fer forgé dont une petite reprise en maçonnerie serait souhaitable.
• Un résistographe 500, pourrait aider à mieux le dater
• Entretien de l'allée des 12 tilleuls de 120 ans, qui eux aussi sont encerclés de bitume en face du cimetière de 1904. faire une estimation de l'état sanitaire de ceux sur la place et dans les cours d'école.

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Histoires d'hier

• En 1095: Santi Marini del Vinos
• Paroisse sur laquelle les évêques de Grenoble possédaient des vignes, très haut en altitude jusqu'au col de Clémencières.
• XIIIe Maladrerie de la Balme (ou léproserie de la Buisserate )
• XIIIe Le château de la Balme (grotte dans le Néron), Fief du seigneur Jarenton de la Balme, passe dans les mains de divers propriétaires.
• 1349 transfert du Dauphiné à la France, l'évêque et le chapitre Saint André n'ont plus que des droits de propriétaires
• Plus tard Santo Martino Vinoso
• XVe , maison du juriste célèbre Guy Pape.
• En 1548-49, on voit pour la première fois une allusion à des consuls de Saint Martin.
• En 1553, Le plus ancien guide routier mentionne "Saint Martin Bons vins"
• 1620, les falaises du mont Jalla tombaient à pic dans l'Isère, Lesdiguières fait construire la voie Royale, la Porte de France, (qui deviendra route impériale, puis nationale, départementale, route touristique Stendhal/ rue de la Résistance)…
• 1621 Le château de la Balme est vendu à des religieux, il devient un monastère: l'Hermitage (Ermites déchaussés de Saint Augustins)
• 1790 février: 1er maire du conseil général de commune
• 1791 les biens du clergé sont vendus, donc fin de la suprématie du monastère (L'Hermitage brûle en 1932)
• Juillet 1793, le comité de surveillance organise fêtes et cérémonies du calendrier républicain
• L'église devient "le temple de l'Etre suprême". La commune s'appelle "Mont-Martin-le-Vinoux".
• 1793 Les lieux de délibérations sont sous le tilleul ancestral ou la place devant l'église

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Histoires locales XIXe siècle

Curiosité: un coeur de béton de 120 ans

Mardi 29 octobre 2001, les jeunes volontaires de Concordia encadrés par les responsables de l'association La Casamaures, ont apporté une grande échelle pendant le tournage du reportage M6. La mousse a été dégagée, en haut du pilier de béton, sur indication de Madame Françoise Pascal. La voisine de l'arbre le surveille depuis 75 ans depuis son jardin qui le surplombe. Nous cherchions une date, 1881 est gravé en gros dans le haut du béton. Cette première restauration du tilleul s'effectue en béton, il y a 120 ans. Depuis vingt ans, il n'y a plus eu d'entretien de qualité. Les branches ont été coupées pour faire passer les fils électriques alimentant le lotissement du Mas d'Oris, dessus le cimentière. Des bois ont été tractés, on voit la trace des coupures de cablage sur le tronc. Puis 1993 pose du goudron pour faire propre... malgré nos discussions à avec monsieur Cornu, maire, et monsieur Ollivier, premier adjoint à l'époque.

Histoire locale des matériaux : bois et ciment

• En 1842, s'ouvre la première cimenterie en Isère, était appelée la 'Porte de France". En 1880, la région grenobloise est la première exportatrice de ciment en Europe. L'entrée est dans le quartier de l'Esplanade appartenant à cette époque à Saint-Martin-le-Vinoux jusqu'au monument de la Porte de France. Sous les contreforts de la Bastille, les galeries d'extraction de la roche sont limitrophes sur des kilomètres. On découvre du ciment prompt naturel appelé "Or gris", 40 ans après il sert de tuteur pour sauver un arbre multi-centenaire.
• En 1882, Grenoble a annexé ce quartier ouvrier sur les contreforts de la Bastille. Des galeries d'extraction de roches permettent de fabriquer du ciment prompt, selon la formulation de l'ingénieur Louis Vicat sur les propriétés du ciment en 1817. En 1970, la cimenterie de la Porte de France est rachetée par la société Vicat.

(lire "L'Or gris du Grand Grenoble", publié à l'initiative de l'association La Casamaures, édition Patrimoine Rhonalpin, Fil d'Ariane).

Les saint-martiniers remplirent le tronc creux de béton, en y gravant en haut 1881 pour commémorer un évènement, le passage d'un dignitaire et l'édification d'une croix juste après la restauration du clocher de l'église? Depuis la couronne du tronc en 120 ans s'est agrandie. Un creux permet malheureusement aux feuilles pourries et aux insectes de se cacher. Les feuilles mortes et les insectes y nichent. Il faut enlever le béton et le remplacer par une charpente adaptée en métal, comme pour le tilleul de 600 ans de Réaumont.

Tous les spécialistes ont toujours rappelé avec insistance qu'il fallait en urgence lutter contre les insectes. Deux nids de frelons et un de guêpes ont inquiété les riverains jusqu'aux élections de mars 2001.

Recherches d'archives, pistes pour mieux connaître l'histoire locale autour de cet arbre.

• Date et circonstances de sa plantation?
• Date de la plantation de l'allée des 12 tilleuls centenaires d'un mètre de circonférence? en même temps que la création au XIXème du nouveau cimetière 1904 ou en même temps que les 8 autres tilleuls sur la place? ceux dans les maisons d'écoles datent de 1882, certains ont été replantés. (vérification de leur taille, tous plus d'un mètre)
• Date de la pose de la croix de mission. Une autre croix est datée de1864, façade sud de l'église. Les croix de mission sont fréquentes au XIXème jusqu'en 1914.
• 1881, restauration en béton, en l'honneur de quelles manifestations autour de l'arbre ? Inauguration de la chapelle Sainte Agnes en 1882.
• Un lieux-dit le "Reposoir" juste plus haut, marque le circuit de procession des croix.

Le vieux village de Saint Martin, (premières notes saisies)

La Mairie et le presbytère étaient dans la plus ancienne maison du village depuis le XVIème siècle (voir une fenêtre en accolade "renaissante", face à l'église, séparés par la récente rue du Vercors). En date du 15 octobre 1822, elle est devenue par une ordonnance du Roi Charles X, frère de Louis XVI, le siège de la Mairie, le domicile du desservant, de l'instituteur et le garde Champêtre.

Malheureusement ce bien de la commune vient d'être vendu à des privés, qui y font des modifications de surélevement de la toiture (sans accord de l'architecte du SDAP). Espérons qu'ils garderont la plaque de marbre de la première mairie de cette commune.

Cimetières:

• autour de l'église jusqu'en 1904.
• En 1867 projet de l'agrandissement du nouveau cimetière. Achat du terrain de M. Voltaire, (Valter) dit restaurateur de la Saucisse, futur maire de Saint-Martin-le-Vinoux. L'allée des 12 tilleuls centenaires date peut-être de cette époque. Il n'en reste huit autres sur la place de l'église (détruit par la construction du CAT).
• Le lavoir communal a aussi été détruit, après la guerre.

1. Il n'y a aucune photo le représentant dans les archives de la conservation du patrimoine de l'Isère, muséee dauphinois.

Eglise Saint Martin

• Soubassements du XVIe siècle, des fouilles archéologiques permettraient de mieux dater l'édifice et ses pierres tombales à l'extérieur sur la place
• 1843 et 1865, restaurations du clocher, du dallage par Eugène Peronnet, architecte diocésain, entrepreneur M. Tornichon
• En 1892.93, deuxième restauration avec l'architecte Jules Riondet. (Riondet: 1864 projet pour la construction de la chapelle de la Tronche.1866 exposition de la Société des amis des arts du musée de peinture de Grenoble. Il meurt en 1887 à 40 ans). Il est aussi architecte du castel Chantoiseau et des maisons d'école en 1880 avec l'entrepreneur Milly dit Brionnet (entrepreneur de la villa néo-moresque 1862. L'entrepreneur s'était construit une gentilhommière: 45 boulevard de l'Esplanade).

1868, Institution Sainte Agnès, Premier asile pour jeunes filles d'idiotes, portant toujours un béret distinctif. Sa chapelle selon les plans d'Alfred Berruyer, architecte diocésain, est inaugurée le 30 mars 1882 par Monseigneur Fava Evêque de Grenoble, les notables et les dames patronesses des bonnes oeuvres

Le 5 février 1877, une souscription a été ouverte pour offrir à l'Etat une subvention de 10 000 fr. afin de hâter l'entreprise des travaux de rectification des rampes de St-Martin-le-Vinoux sur la route nationale 75 et ceci pour occuper les ouvriers au chômage. Ateliers de Charité.

17 avril 1884, la commune perd le quartier de l'esplanade: 2000 francs et toute l'île du polygone en face, avec la construction des dernières fortifications qui défendent la garnison de la Bastille.

Un arbre peut cacher une forêt de tilleuls

De bois et de béton, les strates de l'arbre colossal reveillent l'histoire locale des arbres: huit tilleuls autour de l'église restaurée au XIXème siècle et douze dans les deux cours de récréation des "Maisons d'écoles" bâties en 1882 par Riondet.. Tiens, autre curiosité du XIXème siècle, le coeur de béton qui sert de tuteur au géant végétal a une date gravée: 1881. Sachant que la première cimenterie en Isère fut ouverte en 1842 à la Porte de France et que Grenoble, en 1880, était le premier exportateur de ciment en Europe..

Enquête en cours auprés des anciens, des riverains

- Péllissier Robert. Né à Grenoble le 1er avril 1915, il vit à la maison de retraite Sévigné

Sa grand-mère Amblard l'a élevé au mas caché (1840 +1926). Ecole à Lachal un an, puis à l'externat Notre Dame de Grenoble. Tilleul de Sully: il se souvient d'avoir porté le dais de cérémonie. Il fallait 4 enfants de chœur, et le prête portait l'ostensoir du saint sacrement. Il y avait beaucoup de monde. Le cortège chantait en suivant la procession. C'était joyeux le dimanche matin. Il lit tous les articles sur le tilleul dans le Dauphiné Libéré et comprend pas que la mairie ne l'entretienne pas. C'est comme les fontaines, à chaque fois il demande à son voisin, l'actuel maire de les réparer pour les randonneurs. Avant du temps où il y avait beaucoup de fermes, il y avait des tours pour abreuver les bêtes. D'ailleurs, pour lui ces fontaines sont historiques: La Compagnie Stéphane, les résistants buvaient à la fontaine de Lachal (De Quinsonas. Jarrand…)

- Enquête en cours auprés de Madame Perroud, monsieur Jarrand, madame Françoise Pascal, Hélène Gillet, sœur Marie de la nativité...

 

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Histoires de France au XVIème siècle.

Henry IV: 1553-1610

Le XVIe et ses interminables guerres de religion. Les propriétaires fonciers, seigneurs ou roturiers jouent un rôle essentiel dans la remise rapide en culture des terroirs. Olivier de Serres, gentilhomme paysan, dans son traité d'agronomie encourage le retour dans leurs domaines ruraux des nobles batailleurs et dit à leur sujet :" de leurs épées ils forgeront des socs et de leurs lances des faucilles".

Maximilien de Béthune, Baron de Rosny, Duc de Sully, 1559-1642

Sully, surintendant des finances sous Henri IV, avait ordonné qu'on plantât un arbre dans tous les villages de France... C'est au cours de cette période de reconstruction de la France que le tilleul a dû être planté, mais les archives de St Martin-le-Vinoux ont été dispersées! C'est le temps où Sully, le conseiller le plus proche, le plus compétent et le plus puissant du roi écrit : "Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France".

Né et élevé à la campagne, Maximilien de Béthune, Baron de Rosny, puis Marquis de Rosny en 1601, fut nommé à 46 ans duc de Sully et pair de France en 1606. De Sully est Surintendant en 1598, Maréchal de France en 1634. Principal ministre d'Henry IV, il est représenté pendant longtemps comme très populaire, mais en fait il est imbu de sa noblesse, il méprisait le la bourgeoisie et dédaignait la misère du peuple. Le château de Sully est dans le Loiret. Huguenot, il a poussé Henry IV a se convertir mais lui-même a refusé d'adjurer en acquérant ainsi chez les protestants une renommée d'héroïsme. Il est sûr que le relèvement du pays passe par celui de sa principale richesse : l'agriculture. Il y consacre tous ses soins et s'attache à protéger les paysans contre les abus des gens de guerre et du fisc. Sous l'impulsion de Sully, les surfaces cultivées sont augmentées. Il fait assécher les marais, s'enquiert de la bonne exploitation des forêts, encourage de nouvelles cultures comme celle du mûrier. En bon serviteur de l'Etat, il s'emploie à réaliser le vœu d'Henri IV : Je veux qu'il n'y ait si pauvre paysan en mon royaume qu'il n'ait tous les dimanches, sa poule au pot".

Premières subventions agricoles: tilleuls ou ormes, furent plantés vers 1600 sur tout le territoire français contre rétributions pour faire appliquer les recommandations du Roi Henry IV qui voyait les forêts trop exploitées par les paysans. Dans l'imagerie populaire, Sully est "le grand voyer de France" qui fait améliorer les chemins du Royaume.

L'arbre du village est un repère communautaire qui a plusieurs emplois:

• Arbre de haute et de basse justice avec emploi de potence le cas échéant
• lecture de la justice, des collectes d'impôts
• centre de rassemblement pour écouter les édits royaux ou les décisions des seigneurs locaux
• fonction festive et communautaire : orchestre arboricole pour faire danser les farandoles de jeunes, jeux de maillet, lieu de rendez-vous, épousailles...
• fêtes religieuses, la Fête-Dieu en Mai, les "rogations": des longues processions avec leurs tentures, leurs reposoirs, leurs bannières, les pluies de roses, leurs dais, les stations et leurs bénédictions collectives.

Sous la Révolution, les tilleuls des villageois deviennent "Arbres de la Liberté", les citoyens siégeaient sous son ombre pour délibérer sur la vie de la communauté villageoise. Pour célébrer les fêtes du calendrier républicain en 1792.

L'arbre est un bien communautaire qu'il n'est pas question d'aliéner. Il est né sous le règne d'Henri IV, il a survécu à la folie des hommes et aux calamités de la nature. Hier seigneur des lieux, il n'est plus que gêne pour les voitures. Retrouvons la mémoire de cette bibliothèque vivante, l'histoire d'un village déjà traversé par la voie romaine dont il reste également des traces à valoriser.